Gastronomie

Source: Journal VOIR, 19 mai 2008, 15:06

Par: Yves Bolduc

Au domaine de la plaquebière



En roulant entre Sept-Îles et Havre Saint-Pierre, sur la route 138, il faut faire escale à la Chute Manitou ou la rivière du même nom se déverse puissamment dans l'estuaire du Saint-Laurent du haut de ses 35 mètres accentués de paliers et de bassins. On y accède par un petit sentier d'interprétation et des aires de pique-nique y sont aménagées.

Préparez-vous à parcourir près d'un kilomètre avant d'atteindre le pied de la chute et une fois en bas prenez bien le temps de retrouver votre souffle. Vous en aurez besoin pour remonter les centaines de marches qui vous ramèneront à votre véhicule. Le spectacle époustoufflant de la chute vaut cependant largement l'effort.

Ensuite, en reprenant la route, à une vingtaine de kilomètres plus à l'est, vous arriverez à Sheldrake ou se trouvent de très belles plages ou il fait bon flâner ou faire un pique-nique. La vue du haut du pont est aussi fort impressionnante.

Puis, en reprenant la 138 pour encore huit kilomètres, on arrive à Rivière-au-Tonnerre, charmant petit village qui en plus de posséder une très belle église de bois de style normand datant du début des années 1900, accueille la Maison de la chicoutai.

La petite maison bleue en bordure de route abrite un bien singulier personnage voué à la promotion de ce non moins singulier petit fruit orangé qu'on appelle la chicoutai (qui veut dire "feu" en Montagnais, de la couleur que prend le fruit avant sa maturité).

Le maître des lieux, Bruno Duguay, un passionné du terroire qui décline de mille manières avec un savoir faire magistral le fruit mythique, vous dira tout de ce que les français appelaient plat-de-bièvre (c'est-à-dire nourriture du castor) qui est devenu avec le temps plaquebière.

La chicoutai est une petite plante d'au plus 15 cm de hauteur, de la famille des rosacées. On la retrouve principalement dans les tourbières, les forêts tourbeuses, les marécages (d'ou le surmon de mûre des marécages), et les grandes forêts de connifères de la Côte-Nord et des îles-de -la- Madeleine. Elle met 3 ans à produire ses 2 ou 3 feuilles surmontées d'une seule fleur qui donnera naissance à un seul petit fruit un peu plus gros qu'une framboise. On comprend que la cueillette de ce fruit soit un exercice lent qui en fait un produit relativement onéreux à commercialiser.

Au Québec, la chicoutai pousse surtout sur la Côte-Nord, plus particulièrement sur la Basse Côte-Nord ou elle est très abondante. Mais on en retrouve aussi au Labrador (qui a son festival de la chicoutai) et dans les pays nordiques comme la Suède, la Finlande et la Norvège ou on en fabrique des produits pharmaceutiques, alimentaires ou alchoolisés.

En bouche, la chicoutai a un goût amer et légèrement acidulé. Sa texture est juteuse et pulpeuse, voire presque grasse. On en fait du beurre, de la confiture des pâtisseries et des boissons. On veut même en faire un savon!

Chose certaine, ce fruit est devenu presqu'emblématique de ce territoire qui réserve tant de beautés! Y passer sans y goûter c'est un peu comme manquer le paysage! Faut le faire exprès!

Si vous voulez en savoir un peu plus sur cette plante et ce fruit, il est intéressant de faire une visite guidée de l'archipel de Mingan. Le guide, vous entraînera sur les îles ou se déploient les chicouteraies et vous sensibilisera à l'écosystème qui les accueille. Trop intéressant!

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